Le cadre de mondialisation dans lequel nous sommes plongés
a vu s’estomper bien des repères de culture, voire de
civilisation. C’est là un des traits les plus marquants
de l’époque comme nous l’avons maintes fois noté
et discuté ces dernières années. Nous nous sommes
attardés bien des fois à faire le compte de ces repères
sans jamais vraiment nous y habituer, rien ne pouvant les remplacer
pour supporter la pensée de leur effacement. Penser aborder
la question de l’Éthique dans un tel contexte devient
un pari risqué quand les neurosciences, les pharmaceutiques,
et toutes les idéologies du maintien et du retour au naturel,
donnent encore à penser qu’elles pourraient aider à
sauver ce que les conservatismes de tous genres ont tellement peur
de perdre.
Comment
revenir aux fondements qui permettent de repenser pour aujourd’hui
la question de l’Éthique autrement qu’en en faisant
un support pour ce qui reste d’une morale qui a perdu l’efficacité
de ses idéaux et de ses valeurs. Au plus haut niveau du lien
social, en politique et dans les affaires, l’éthique
est devenue une question théorique. Ce souci nous pousse
à revenir cette année sur les enjeux de l’esthétique
ou de son défaut dans leurs conséquences pour les
individus et les collectifs. Curieusement ces considérations
nous confrontent à l’estompage sinon la perte du sexuel
dans le contexte de la dégradation des repères de
culture que la confrontation des civilisations nous contraint à
constater.
Dans
les faits, la violence sous certaines de ses formes a pris le relai
d’une esthétique qui ne peut disparaître, puisqu’elle
fonde l’humain, mais qui est en perte de repères collectifs.
Nous ferons le constat et l’argument de ce déficit
de l’esthétique dans le champ de la sexualité.
Comment en effet imaginer une sexualité sans esthétique
dans l’histoire de l’humanité telle qu’on
commence à en prendre conscience aujourd’hui ? C’est
le côté comique des encyclopédies et des dictionnaires
qui nous renvoient encore à des distinctions du genre sexualité
des plantes, sexualité des animaux, versus sexualité
humaine avec force recours à des données scientifiques
sur la reproduction des organismes. Pourtant très précisément
ce qui est évacué de la sexualité et qui lui
donne toute sa dimension proprement humaine c’est cette reproduction
comme telle en tant qu’elle est utile au collectif. En libérant
l’individu du collectif la sexualité ouvre à
une dimension de l’esthétique qui met en cause les
visées même du collectif. C’est ce phénomène
que nous n’étions pas censés ignorer qui occupe
maintenant le devant de la mise en scène médiatique
du sexuel.
Nos
discussions cette année tournerons donc autour de cinq principes
décapants pour les idéologies dominantes qui s’efforcent
de succéder aux religions dans l’entreprise du contrôle
du sexuel.
1.-
Il n’y a pas de sexualité sans esthétique.
2.-
Le sexuel est nuisible pour le collectif dont il fait obstacle à
la reproduction idéologique.
3.-
La sexualité affirme la singularité irréductible
du sujet en le coupant définitivement de l’Autre et
de l’autre.
4.-
Pas d’éthique sans cette érotique subjective
qu’est la sexualité!
5.-
La sexualité, une pratique érotique qui noue l’éthique
à l’esthétique.