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Débat


 


Qui a peur de la psychanalyse?
Willy Apollon

Comment penser une évaluation d'un traitement psychanalytique des psychoses
Lucie Cantin

 

Qui a peur de la psychanalyse?

Willy Apollon
Santé mentale au Québec (2005), vol. 30, n° 1 : 165-182.

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Le Centre de traitement psychanalytique pour jeunes adultes
psychotiques de Québec, dit le 388

Il faut faire la part de ce qui est rumeur psychiatrique, de ce qui est de l’opposition aveugle, et de ce qui est de l’ordre de la critique constructive et des faits vérifiables concernant le 388, ce Centre de traitement psychanalytique pour jeunes adultes psychotiques, que nous avons créé et que nous dirigeons depuis vingt-deux ans. Ce qui se lit dans certains textes publiés ici pour ce débat, laisse rêveur en ce qui concerne le souci d’information vérifiable chez certains chercheurs, intellectuels, voire enseignants d’université, qui se veulent tous bien sûr des scientifiques. Dans certains milieux quand on est entre pairs, sans aucun souci de multidisciplinarité véritable, on dirait qu’il est de bon ton de parler de tout et de tous sans qu’il soit nécessaire de ne rien savoir de ce dont on parle. Il ne s’agit pas d’abord de faussetés ni de mensonges, même s’ils sont aussi présents, c’est un certain style, une certaine manière de penser et de faire; une fois qu’un certain consensus est établi sur l’identité de l’ennemi commun, tous les coups sont permis. Pour certains, la psychanalyse, toutes problématiques d’École confondues, ce serait l’axe du mal dans la psychiatrie. C’est d’autant plus intéressant d’un point de vue épistémologique, quand de tels milieux se posent en défenseurs de la science, de l’éthique, de la vertu, de la veuve et de l’orphelin.

Quelques faits vérifiables pour qui veut bien s’en donner la peine

La clientèle du 388

Au 7 octobre 2004, le Centre avait en traitement intensif 88 patients, dont 67 % ont un diagnostic antérieur de schizophrénie, 28,4 % d’autres psychoses et maladie affective bipolaire avec sévérité psychotique, 2,3 % de personnalité borderline avec troubles d’adaptation sévères et enfin 2,3 % de névrose sévère avec troubles d’adaptation. Il s’agit donc en résumé de 95.4 % de patients avec un diagnostic de troubles mentaux sévères et persistants au moment où ils consultent au Centre pour la première fois.

La moyenne d’âge de la clientèle actuelle à l’arrivée au Centre était alors de 27 ans. Ces patients habitent dans la grande région de Québec, ou s’ils viennent d’ailleurs dans la province, y prennent un appartement pour être traités au Centre. Le nombre moyen d’hospitalisations antérieures par patient est de 3,4. Ces patients ont fait un choix pour un traitement psychanalytique, en faisant eux-mêmes la démarche pour être reçus en évaluation au comité d’admission. La majorité d’entre eux disent avoir consulté au Centre parce que les traitements antérieurs n’ont pas amélioré leur condition. Ces traitements sont les traitements classiques donnés dans tous les hôpitaux psychiatriques en Amérique du Nord, assurés avec compétence dans les services publics du système québécois de Santé. Il est généralement reconnu que le système de Santé québécois figure parmi les meilleurs. Le 388, comme Centre de traitement psychanalytique, fait partie de ce système de Santé public depuis 22 ans, même si sa gestion était opérée par un organisme privé sans but lucratif.

Les services offerts au 388

Dès son admission au Centre, chaque patient est suivi par une équipe formée de lui-même, de son intervenant clinique responsable, du travailleur social et d’un psychiatre agissant comme médecin responsable de l’équipe de traitement. Un plan de traitement et d’intervention est alors mis en œuvre par l’équipe avec sa collaboration. Ce plan sera réévalué aux six mois avec lui, en tenant compte de l’atteinte des objectifs souhaités dans l’évolution de son traitement. Il commencera une cure psychanalytique dès qu’il y sera prêt, avec un analyste qui ne sera jamais son psychiatre. Des programmes d’ateliers d’art, dirigés par des artistes de la ville de Québec lui sont offerts au Centre, en musique, céramique, art dramatique, arts visuels, et écriture. Sept lits de traitement de la crise sont disponibles au Centre pour lui permettre un traitement de la crise dans un contexte de vie urbaine normale plutôt qu’à l’hôpital, auquel on n’aura recours qu’en cas de nécessité et sur une décision médicale de son psychiatre.

Ces services sont offerts à tous les patients 24 heures par jour et 365 jours dans l’année. Il s’en suit donc un support direct aux familles dans le cadre de ce suivi intensif. Elles sont rencontrées par l’ethnoanalyste du Centre chargé d’établir l’histoire, la structure et la ynamique familiales pour l’équipe de traitement, avec les membres de la famille désignés par l’usager lui-même, et qui acceptent de collaborer à son traitement. Par ailleurs dans les moments stratégiques du traite
ment entraînant des difficultés spécifiques entre le patient et ses parents ou des membres de la famille, ceux-ci seront rencontrés par le travailleur social ou dans certains cas par le psychiatre du patient. Les parents des patients du Centre forment une association, dont le comité directeur se réunit régulièrement au Gifric pour échanger et travailler avec les analystes qui ont créé et développé le traitement.

Enfin, sont organisés par les intervenants et les usagers, sous le contrôle des équipes de traitement, des activités d’intégration à la vie sociale et communautaire. Ce sont en général des activités de groupe en ville, ou au 388: activités sportives, activités socioculturelles, activités de préparation au retour au travail ou aux études, des projets spéciaux tels que l’organisation de voyages, des camps d’hiver ou d’été, etc.. Des voyages ont eu lieu ainsi au Vénézuéla, aux États-unis, à Cuba… Ces voyages sont préparés de longue date par les patients, soit en général 18 à 24 mois à l’avance. Une telle préparation occasionne des recherches, des études sur des pays et des sites possibles, des contacts avec des organismes de tourisme et des activités de production et de vente d’objets d’art ou artisanaux au bénéfice du financement de l’activité.

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