II.
Vu de l�ext�rieur :
La v�rification par le tiers en position de passeur,
l��valuation par l�observateur externe
Les
quatre dimensions que nous venons de d�finir o� se mesurent
les avanc�es du psychotique dans le travail analytique cernent
du coup les �l�ments dont le psychotique lui-m�me peut t�moigner,
en position de passant en quelque sorte, face � d�autres, capables
d�entendre et de prendre la mesure des progr�s dont il rend
compte. Je distinguerais � cet �gard, deux positions diff�rentes
de �t�moins� � qui le psychotique fait �tat de son �volution
: d�abord, le tiers en position de passeur, habilit� � reconna�tre
les changements psychiques profonds que supposent les modifications
dont il est t�moin dans le discours et dans la vie du psychotique
; puis l�observateur externe � qui le psychotique s�adresse
sur la sc�ne sociale et qui prend acte d�un certain nombre de
changements qu�il peut lui-m�me �valuer, mais sans pouvoir les
lier � ce qui les a rendus possibles dans le processus analytique.
Le
tiers t�moin en position de passeur
Dans
le Centre de traitement �Le 388� o� nous op�rons, deux personnes
sont de fa�on permanente, dans cette position de tiers passeur
capable d��valuer le d�placement et l��volution du psychotique
dans le processus analytique : le psychiatre traitant et l�intervenant
clinique. Le psychiatre traitant qui est aussi par ailleurs
un psychanalyste sera non seulement le t�moin direct des effets
de la cure analytique mais aura aussi l�occasion d�entendre
le psychotique lui-m�me lui faire part des d�couvertes qu�il
a faites dans son analyse. C�est d�ailleurs cette prise de parole
du psychotique comme sujet et le savoir qu�il travaille � mettre
en place et dont il rend compte au psychiatre qui donneront
� celui-ci les moyens d��tablir un mode de traitement qui n�est
plus r�ductible au traitement du sympt�me par la seule intervention
m�dicamenteuse. Il aura en effet acc�s aux singularit�s de l�univers
mental du psychotique, aux �l�ments d�terminants de sa position
subjective, aux changements provoqu�s par le travail analytique
et � l�impact de ces changements profonds dans sa vie. Il pourra
ainsi anticiper les moments cruciaux de la cure et leurs effets,
pr�venir les p�riodes difficiles li�es aux r�am�nagements que
le psychotique fait alors tant dans son univers mental que dans
sa vie concr�te.
C�est
en effet essentiellement � partir du t�moignage du psychotique
lui-m�me que le psychiatre pourra rep�rer le point o� en est
ce dernier dans le processus analytique, mesurer la position
de celui-ci par rapport au d�lire, devenir le t�moin de la chute
des id�es d�lirantes, des modifications dans la ph�nom�nologie
de la crise et bien s�r des changements qui ont cours dans le
rapport � l�autre et le lien social.
C�est aussi gr�ce au lien toujours maintenu avec le sujet et
� l�acc�s constant � la logique de son parcours tel que ce dernier
peut lui-m�me en faire �tat, que le psychiatre disposera des
balises et moyens n�cessaires pour traiter le psychotique en
crise en dehors de l�h�pital, dans un milieu compl�tement ouvert
o� des ententes verbales et des engagements pris dans la parole
avec lui deviennent suffisants pour constituer un cadre � l�int�rieur
duquel la crise peut �tre travers�e. L��volution des formes
que prennent les crises � mesure que le psychotique avance dans
son travail d�analyse rend possible le maintien d�une parole
de sujet m�me pendant la crise.
Le psychotique arrive progressivement donc � maintenir une distance,
une certaine position d�observateur capable de parler de quelque
chose qui le traverse et qu�il ne contr�le pas, au moment m�me
o� il le vit. Du coup, dans cette position de t�moin par rapport
� lui-m�me qui rend possible pour lui la transmission de son
exp�rience � un tiers, il donne au psychiatre la possibilit�
de discuter et de mettre en place avec lui les moyens n�cessaires
pour traverser la crise. � partir d�un certain point qui est
tr�s pr�cis�ment le moment de l�entr�e du psychotique dans le
transfert, le traitement de la crise ne se fera plus sans lui,
jusqu�� ce que progressivement le psychotique arrive, � la fin
de la cure, � une autonomie psychique qui lui permettra d�assumer
seul les situations qui auparavant le pr�cipitaient dans une
crise.
L�exp�rience nous a enseign� que seule la cure analytique pouvait
entra�ner de tels changements, en permettant au psychotique
de constituer un savoir qui d�sormais lui sert de point d�appui
dans la gestion de sa vie. Les psychotiques qui ont refus� d�entrer
dans l�analyse nous ont montr� la limite qu�ils rencontraient
rapidement dans leur �volution, m�me si par ailleurs ils recevaient
tous les autres services que le Centre peut offrir. Ils ne parvenaient
jamais � d�passer un certain point, bien rep�rable dans l�absence
d��volution des crises qui ne se modifient pas, ni dans leurs
formes, ni dans leurs fr�quences, ni dans leurs contenus. En
fait, en refusant de devenir des analysants, ils se maintiennent
dans une position d�objet appelant une prise en charge institutionnelle
dont les limites sont celles-l� m�mes que le sujet pose au traitement
en refusant d�y engager sa responsabilit�.