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Débat


 


Qui a peur de la psychanalyse?
Willy Apollon

Comment penser une évaluation d'un traitement psychanalytique des psychoses
Lucie Cantin

 

Comment penser une évaluation
d'un traitement psychanalytique des psychoses

Lucie Cantin
La cure psychanalytique du psychotique. Enjeux et stratégies (2008), Éditions Giifric, Québec : 87-120.

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D�autres �quipes ou personnes ont aussi occup� cette place d�observateurs externes et se sont retrouv�es dans une position semblable � celle des �valuateurs. Il y a un peu plus d�un an, un journaliste d�un grand quotidien qu�b�cois rencontrait un groupe de six usagers du �388� qui avaient accept� de r�pondre � ses questions. Le journaliste, dans l�apr�s-coup, nous faisait part de la forte impression qu�avait eu sur lui ce qu�il consid�rait �tre une exp�rience unique, surprenante et touchante. L� encore, les usagers avaient choisi de t�moigner du choix de traitement qui avait �t� le leur, des effets de ce traitement sur leur vie, du processus de la cure analytique qu�ils consid�rent toujours comme un v�ritable �travail�, de la fa�on dont ils arrivent par le travail du r�ve � �faire des liens avec leur pass�, etc. Quelques exemples de propos tenus par les usagers lors de cette rencontre avec le journaliste nous font mieux comprendre l��tonnement de ce dernier : �Vous savez, m�me si en psychose on n�est pas toujours compl�tement connect� � la r�alit�, �a part toujours de quelque chose. Il suffit de le trouver� ; �Quand, dans la cure, on apprend � d�crire notre mal, les solutions arrivent diff�remment� ; �Ici, c�est nous qui sommes au c�ur de notre travail, on a les outils, mais c�est nous qui faisons le travail� ; �Avant, mon Inconscient me jouait des tours. Avec le travail de la cure, j�explore cet Inconscient-l� pour arriver � le conna�tre� ; �De comprendre mes r�ves, �a me fait comprendre mes m�canismes � moi, mes perceptions. �tre capable d�identifier ce qui est de la perception, ce qui est du senti, ce qui est de l�imaginaire. Et une fois que tu en parles, tu arrives � le dissocier du r�el et � d�m�ler ce qui est r�el et ce qui ne l�est pas. Tu l�as d�fini, circonscrit et tu l�as analys�. Et en l�analysant, tu te comprends mieux toi-m�me, tu as un regard sur toi, une r�flexion sur toi. Ce qui fait que s�il se passe quelque chose qui te fait peur, �a donne un temps de recul, �a permet de ne pas �tre subjugu� par tes r�actions� ; �Tu penses : j�ai d�j� vu cela. Il faut que je fasse attention, je sais comment �a va marcher � ; �On d�veloppe une fa�on de toujours se mettre en lien avec la source de notre malaise, de notre souffrance, de retourner � la source �. Ce genre de discours, inattendu de la part de psychotiques, �tait pour le journaliste la marque d�un �travail� dont il entendait les effets.

Plus r�cemment, un groupe de chercheurs de l�Universit� Harvard de Boston, subventionn� par le NIMH am�ricain (National Institute for Mental Health) et travaillant � d�terminer les conditions qui rendent possible la r�int�gration sociale des personnes souffrant de troubles mentaux graves, s�est int�ress� au �388� en raison de la qualit� des services qui y sont offerts et des r�sultats cliniques obtenus. Ils ont donc sollicit� la collaboration du GIFRIC � leur travail et ont eu l�occasion, lors d�une r�cente visite au �388�, de rencontrer un groupe constitu� d�une vingtaine d�usagers. Bien que s�int�ressant essentiellement aux conditions et effets du traitement sur le niveau de r�int�gration sociale des personnes, ces chercheurs ont dit � avoir entendu les effets du traitement analytique � dans les t�moignages re�us, dans la fa�on notamment dont les psychotiques s�expriment et articulent en groupe leur position subjective en regard du point o� ils en sont dans leur traitement et dans leur r�articulation sociale.

Il ressort de l�ensemble de ces exp�riences que l�observateur externe, quel que soit son champ d�int�r�t, � partir du moment o� il se met � �couter ce que les usagers ont � dire, peut � travers leurs t�moignages saisir les effets du traitement analytique, identifiables � cette �distance� prise par le sujet qui lui permet de parler de lui-m�me et de sa psychose d�une fa�on remarquable et in�dite pour l�observateur. Cette reconqu�te d�un espace subjectif d�o� une parole distanci�e devient possible sur ce qui ali�ne l��tre est rep�rable aussi par les psychiatres ext�rieurs au �388� quand ils ont l�occasion d��valuer un �patient du "388"� qu�ils reconnaissent toujours justement. La parole du sujet engag� dans le travail analytique ouvre l�acc�s � un univers mental autrement inabordable qui, loin de biaiser �l�objectivit� de l��valuation, livre une logique et des enjeux psychiques indispensables � une v�ritable �valuation clinique. Je laisserai l�un de ces psychiatres ext�rieurs exprimer ce qu�ils observent :

�Le psychiatre "ext�rieur" est celui � qui l��quipe du "388" demande d��valuer un usager en crise, en l�absence du psychiatre traitant. Il est � la fois ext�rieur � l��quipe et au Centre. Ce psychiatre doit n�anmoins avoir une connaissance de l�approche d�velopp�e au "388", car la demande d��valuation est expos�e � partir du contexte singulier de la crise et non des sympt�mes psychotiques usuels.

Lors de sa rencontre avec un psychiatre "ext�rieur", le psychotique qui fait une cure analytique parle, expose, argumente. Il pr�sente peu ou pas de "d�ficit" ou de "sympt�mes n�gatifs". Cela ne signifie pas que la d�pression ou le d�couragement sont exclus chez ces usagers. L�un d�eux, actuellement en difficult�, raconte spontan�ment sa situation en lien avec son histoire, par o� il est pass�, ce qu�il comprend de sa cure. Tel autre revendique ses droits et sa libert�. Tel autre conteste la recommandation de l��quipe d��tre r�sidant au Centre et n�gocie sa m�dication.

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